Au pays du bébé obscur
Publié le 10 Juillet 2014
Hier, j'ai reçu mon amie bohème, avec ses deux enfants. Quand nous faisons nos premières armes dans le monde merveilleux de l'infertilité, on est un peu gnangnan (en tout cas moi je l'étais) : c'est tellement mignon! Oh il a fait caca le petit ange? Gouzi gouzi!!!. Hier, je l'avoue, je me suis dit à plusieurs reprises qu'elle n'avait pas vraiment tort quand elle me disait que ma vie avait un petit air de paradis...
Commençons par ma maison, parce que Carotte Ferjani, c'est moi. Le home staging, c'est mon hobby, la déco, ma façon à moi de faire mon nid à défaut d'avoir un utérus accueillant. Ma maison n'est pas DU TOUT adaptée à cette race qu'est le jeune enfant : tout est à portée de main (y compris mes orchidées vénérées, -mais chaque maman, je crois, avant de venir chez nous, doit bien les briefer sur le sujet, par peur de l'incident diplomatique, car aucun accident n'est recensé à ce jour... AMEN-). Et au delà de ce qui peut être léché, mâchouillé, cassé, et abîmé, il y a plein de dangers aussi : quand son grand saute de l'accoudoir du canapé vers la méridienne, mon coeur explose : j'ai peur qu'il se fracasse la tête contre le mur, déjà, et ensuite je pense à mon mac, juste à côté du point de chute. Avoir un enfant, c'est mettre son coeur à l'épreuve.
D'un coup, je réalise que mon mac ne peut peut plus rester dans le salon pour surfer à ma guise sur internet en me gavant de télé, que la table basse ne pourra plus être the place to be, car franchement, nous avons une table mais pour faire genre (pour recevoir du monde quoi). Que ça soit la table du salon, celle du jardin ou l'îlot de la cuisine, quand nous sommes seuls, nous n'y allons presque jamais. Nous sommes de vieux ados attardés, acte 1 (oui oui, mais qu'est-ce que c'est bon!!!).
Nous essayons de parler avec ma copine bohème (elle s'inquiète pour moi, je ne parle pas de nos problèmes et elle ignore que nous sommes en PMA) mais le plus grand a envie de parler aussi, et je réalise qu'avec des enfants, avoir une conversation, c'est compliqué. Surtout quand, comme moi, vous passez du coq à l'âne et perdez le fil de vos pensées en un rien de temps.
Alors qu'elle part chercher une compote dans sa voiture, elle me laisse les deux. Moi je vis ma vinaigrette ma vie, fais mon petit rangement, tout ça tout ça. Quand elle rentre à la maison elle s'exclame : "Mais où est Juliette?" (18 mois NDLR). Autant vous dire que si j'avais pu me planquer dans la poubelle, je l'aurais fait, parce que je n'avais non seulement aucune réponse à cette question, mais qui plus est la surveiller ne m'avait pas effleuré l'esprit. Ado attardée, acte 2.
Nous finissons notre journée par une virée chez Bébé vieux (chut chut pas de marques) où je n'avais jamais mis les pieds. J'étais passée devant, plusieurs fois, le coeur et les yeux embués face au slogan "le spécialiste du bonheur". Là j'y suis rentrée sans aucun problème, c'est même moi qui ai proposé à ma copine bohème de l'accompagner, car je pense qu'elle n'osait pas trop m'infliger ça. Victoire sur moi même acte 1.
Bah bébé vieux c'est trop mignon, je me suis attendrie sur TOUT (sauf les prix, même en solde!). Ca m'a fait bizarre aussi, ce monde parallèle, avec des tours de lit Moulin Roty et des petites combinaisons adorables. Le shopping c'est aussi ma seconde peau, et je me prise à imaginer quelle chambre choisir, regarder les gigoteuses... Je vous jure que je n'ai pas eu mal, j'ai fait comme quand je rêve que je gagne à l'euromillion et que je me pose plein de questions très rationnelles : est-ce que j'arrêterais de travailler? Est-ce que je ferais le tour du monde? Est-ce que je vendrai ma maison? Est-ce que je partagerais avec l'homme?
J'ai bien évidemment envie que mes petits champions fassent leur nid et vivre l'aventure de la maternité, même si le rêve confronté à la réalité n'est pas aussi glamour que dans mes pensées. Mais j'ai le sentiment aussi, qu'une partie de moi a grandi, qu'un cheminement se fait tout doucement dans ma tête : celui du deuil, le deuil de ma douleur, le deuil de ma colère. Comme un mécanisme de défense, comme une réalité que je ne rejette plus, mais que j'accepte. C'est rassurant d'aimer sa vie telle qu'elle est aussi, bien que la chambre d'amis reste vide. Victoire sur moi-même acte 2.
Tout ça est encore très fragile, parce que rien qu'a l'idée de ma prise de sang la semaine prochaine, mon coeur se serre. Mais j'apprends aussi à savourer les petites victoires comme elles viennent tout en acceptant que ma plus belle revanche ne sera peut être pas la semaine prochaine. Mais quand même, j'espère bien fort....
Pub Volkswagen et bébé Dark Vador - Que la force soit avec toi petit ....
Pub Volkswagen et bébé Dark Vador - Que la force soit avec toi petit ... Stars wars